«Merci !»

Mais de rien. Mais au fait Jammy, d’où vient cette expression en français ?

Je profite de cette journée du 11 janvier, journée internationale du « merci » pour partager quelques infos sur la politesse en général, ainsi que différentes façons de remercier dans différentes langues au travers le monde. Et les langues, ça tombe bien, c’est mon domaine. Tour d’horizon :

Pourquoi merci ?

D’origine latine, mercedem, le mot merci a vu son, ou plutôt ses sens transformés au fil du temps.

Signifiant initialement, « salaire » ou « récompense », le mot évolue pour tantôt signifier la pitié, la miséricorde, demander grâce (crïer merci), les faveurs d’une dame (le don d’amoureuse merci, par exemple), ou la rançon, le rachat (à la merci de). Ce n’est finalement qu’au XIIe siècle qu’il prend son sens de remerciement.

Le nom devient un verbe, mercier en vieux français, puis remercier au XIIIe siècle.

On retrouve aujourd’hui diverses expressions plus ou moins figées avec le mot, essentielles pour certaines à connaître pour un étranger souhaitant apprendre le français. Pêle-mêle : « en vous remerciant », « merci d’avance », « mille mercis », « un grand merci », « dieu merci » ou encore sa version verlan « ci-mer ».

Et à l’étranger ?

L’anglais (vu que c’est mon domaine aussi) n’est pas en reste avec des tas d’expressions, telles que : « thank you », « thanks », leur abréviation respective « ty » et « thx », « many thanks », « I appreciate it », « thank you ever so much », « cheers » (principalement dans sa version britannique), « much obliged », etc.

A noter ainsi que « no mercy » est ici un faux ami et ne signifie pas « Non merci », mais « pas de quartier » !

Je ne peux m’empêcher également, puisqu’on parle de politesse, de mentionner les Canadiens, largement connus et réputés pour leur politesse (un brin zélée parfois). Le fameux « sorry not sorry ». N’ayez pas peur de voir des gens dire merci à un distributeur automatique au Canada donc (j’exagère à peine).

Je vous laisse au passage essayer de retrouver de quelles langues viennent les « mercis » suivants :

« Grazie », « Danke », « Спасибо », « Dzięki », « Takk » ou encore « Dankon ».

En langue des signes, il vous suffira de placer votre main à plat sur votre bouche, puis de l’avancer (ce qui ressemble, pour moi en tout cas, à un baiser qu’on enverrait, quelle meilleure façon de remercier ?).

Plus étonnant, certaines langues expriment le fait de remercier différemment. Ainsi certaines populations parlant encore le quechua (aucun rapport avec Decathlon), une des langues encore vivantes des Incas, notamment au Pérou, ne disent pas merci, qui n’est tout simplement pas un concept dans certaines cultures. A la place, pour vraiment remercier une personne, les autochtones lancent les feuilles d’un arbre local devant la personne en guise de gratitude.

Des chiffres, des chiffres !

Comme à mon habitude, je me dois de vous partager quelques statistiques sur, plus généralement que le merci, la politesse, en particulier en société et dans le monde du travail, statistiques qui sont à prendre avec grosses pincettes.

Ainsi en France, 70% de la population estime que la politesse se perd de plus en plus, l’Ipsos ayant relevé que le plus grand acte d’incivilité pour les Français était de ne pas céder sa place à une personne âgée dans les transports en communs (67%), les personnes les moins polies étant (a priori) les jeunes (32%), les vendeuses de grands magasins (35%) et les fonctionnaires (20%).

Toujours d’après l’Ipsos, 82% des Français s’estiment « assez polis », voire « très polis » (12%), tandis que les Suisses, les Allemands et les Anglais sont considérés comme les plus polis de nos voisins (39, 36 et 31%, respectivement).

Dans le même temps, environ 80% des employés déclarent qu’ils seraient prêts à s’investir davantage s’il y avait plus de reconnaissance sur leur lieu de travail (collègues et direction), où la productivité d’une entreprise serait environ 14% plus élevée dans un milieu pratiquant une forme de reconnaissance comparée à une sans gratitude.

85% des professionnels (dont RH) souhaitent entendre des remerciements dans leurs interactions quotidiennes, et 27% des salariés indiquent que le manque de reconnaissance est une raison importante de quitter un employeur. Vous voilà prévenus.

Ça ne mange pas de pain !

Au final et pour faire la transition avec mon paragraphe sur les statistiques, le fait de remercier a un vrai rôle psycho-social et est ancré dans l’inconscient collectif humain global, puisque présent dans toutes les cultures du monde, d’une façon ou d’une autre. L’Homme avec un grand H étant une créature purement sociale, il nous paraît nécessaire d’exprimer une forme de gratitude et de reconnaissance, et ce, à tous les niveaux : envers Dieu, envers la Nature, envers nos aînés, envers les autres, envers nous-même.

En faisant quelques recherches sur le web pour écrire cet article, j’ai pu trouver nombre d’articles (en français) stipulant que la politesse perdait du terrain chez les jeunes générations, et était considérée même comme « vieux jeu » (à l’époque appelée courtoisie), et les constats sont souvent assez pessimistes.

J’y ai trouvé en revanche une citation de Carl Jung assez évocatrice : « L’Homme moderne ne peut voir Dieu, car il ne regarde pas assez bas ». Ce serait donc à nous, et à notre niveau, individuel, d’accorder la reconnaissance, le pardon, la gratitude, autant de valeurs divines qui, au final, sont très simplement à la portée de chacun. En commençant par exemple, avec un simple merci ?